La musique minimaliste, également appelée minimaliste répétitive, fait son apparition au début des années 1960 aux Etats-Unis. Le terme "minimaliste" est emprunté au minimal art apparu aux Etats-Unis vers 1965. Le minimalisme en peinture et sculpture rejette à la fois le lyrisme de l'expressionnisme abstrait et la figuration du pop art. Il vise une neutralité esthétique absolue : épure des formes, froideur, refus de toute subjectivité. Un seul mot d'ordre : The less is more ("le moins est le mieux"). La musique minimaliste était très liée à ce mouvement traversant diverses pratiques artistiques sans forcément en adopter tous les préceptes. Lors d'une interview à New Music Box en 1998, Steve Reich témoigne qu'à ses débuts son public était essentiellement constitué d'un petit cercle d'artistes (peintres, sculpteurs, réalisateurs, chorégraphes...), parmi lesquels figurait Sol LeWitt, qui lui acheta des partitions, dont celle de Four organs (1970). Bruce Nauman, Richard Serra contribuèrent à sa programmation respectivement dans les musées de Whitney et Guggenheim à New York. C'est en ce musée Guggenheim que Four Organs a été créé le 7 mai 1970. L'oeuvre y a été enregistrée, jouée par Steve Reich, Art Murphy, Philip Glass, Steve Chambers aux orgues et Jon Gibson aux maracas. Elle a été publiée par le label français Shandar en 1970, illustrée d'une image extraite du film expérimental Wavelength de Michael Snow de 1967. Charlemagne Palestine s'inspirait quand à lui directement de Mark Rothko, Barnett Newman et Clyford Still. Il s'est lancé dans une recherche d'un son infini comme on peut se perdre dans l'immensité d'une seule couleur.
Le minimalisme en musique se caractérise par un rejet du sérialisme, système de composition dans lequel la nouvelle génération ne se reconnaît pas. La musique sérielle se voulait fondamentalement atonale. Le minimalisme prône un retour à la tonalité, mais pas seulement. La plupart des compositeurs minimalistes ont expérimenté la Tape Music (manipulations de bandes magnétiques, proches de la musique concrète française) et les premiers instruments électroniques (oscillateurs, synthétiseurs). Ils ont côtoyé les pionniers de la musique électronique aux Etats-Unis (Richard Maxfield, David Behrman, Morton Subotnick...). Pauline Oliveros, Terry Riley et Steve Reich ont fréquenté le San Francisco Tape Music Center, où Don Buchla développa la Buchla Box, un synthétiseur modulaire. Beaucoup se sont également plongés dans l'étude des musiques traditionnelles. Terry Riley, La Monte Young et Charlemagne Palestine ont suivi l'enseignement de Pandit Prân Nath, grand maître du raga indien du nord. Philip Glass a suivi celui de Ravi Shankar. Steve Reich, Ingram Marshall et Charlemagne Palestine ont étudié les gamelans balinais. Certains protagonistes du mouvement minimaliste sont d'abord passés par le jazz. La Monte Young a joué avec Don Cherry et Eric Dolphy dans les années 50. Steve Reich souhaita un temps devenir batteur de jazz.
Deux tendances, très perméables, se sont dessinées. Tout d'abord un minimalisme radical, qui se focalise sur les sons continus, les drones et l'intonation juste, avec La Monte Young, Charlemagne Palestine, Michael J. Schumacher... Ensuite, un minimalisme répétitif, où de courts motifs mélodiques, harmoniques ou rythmiques sont répétés. D'infimes variations de ces motifs provoquent des effets psychoacoustiques chez l'auditeur, comme bercé, hypnotisé. Cette tendance répétitive est représentée par Terry Riley, Steve Reich, Philip Glass, John Adams...
La tendance radicale, basée sur les sons continus, les "drones", est principalement initiée par les expérimentations de La Monte Young. Vers 1958/1959, il abandonne le sérialisme pour des oeuvres ouvertes, influencées par le principe d'indétermination cher à John Cage. Il compose notamment Trio for Strings en 1958. En 1960, La Monte Young est partie prenante des prémices du mouvement Fluxus. Il programme une série de concerts dans le loft de Yoko Ono à New-York (bien avant qu'elle ne rencontre John Lennon, les Beatles n'ont pas encore sorti "Love Me Do", qui date de 1962). Les compositions de La Monte Young de 1960 sont de simples indications de jeu, d'action : "Si et fa dièse à tenir longtemps" ou "Tirez une ligne et suivez la". En 1962 La Monte Young compose "The Four Dreams of China" et souhaite dès lors créer des oeuvres musicales d'une durée potentientiellement infinie. Oeuvres musicales, et visuelles, le son et la couleur. Il a rencontré l'artiste Marianne Zazeela. Ils créent ensemble, en août 1963, leur première Dream House, installation visuelle et sonore immersive, où notes tenues et systèmes de projections de lumières forment un nouvel espace-temps en trois dimensions et pouvant être prolongé à l'infini. En 1967, La Monte Young et Marianne Zazeela rencontrent Pandit Prân Nath, spécialiste du raga indien et du style Kirana. Le bourdon lancinant dans les ragas indiens entre en résonance avec les recherches de La Monte Young sur les sons continus. La Monte Young, Marianne Zazeela et Terry Riley deviennent des disciples de Pandit Prân Nath, jusqu'à sa mort en 1996.
In C, composée par Terry Riley en 1964, est considérée comme l'oeuvre fondatrice de la tendance minimaliste répétitive. L'oeuvre est créée en novembre 1964 par Steve Reich, Jon Gibson, Pauline Oliveros, Stuart Dempster, Morton Subotnick et d'autres musiciens du San Francisco Tape Music Center. Son titre signifie "en do majeur". La partition tient sur une seule page. Il s'agit plus exactement d'un cadre d'action, à l'instar des propositions de performances Fluxus. Elle présente 53 motifs mélodiques que chaque instrumentiste est libre de répéter autant de fois qu'il le souhaite avant de passer au motif suivant. In C a été enregistrée pour Columbia Records en 1968 par David Behrman. De nombreuses versions ont été enregistrées depuis, par les ensembles Ictus, Salt Lake Electric Ensemble, Bang on a Can, DésAccordes, The Sensorium Saxophone Orchestra, le collectif Africa Express fondé par Damon Albarn (In C Mali), et en 2022 par The Young Gods.
Le minimalisme correspond plus ou moins à une période de la création musicale contemporaine qui s'étend du milieu des années 1960 au milieu des années 1970. Au-delà de cette période ses principaux protagonistes et de nouveaux arrivants ont complexifié leur langage et diversifié leurs influences et approches, et ce à un point tel qu'on ne peut plus réellement les qualifier de minimalistes. L'adjectif ne fut d'ailleurs jamais réellement accepté par les compositeurs eux-mêmes. Le minimalisme, courant musical à la croisée des chemins, a subi un véritable éclatement et connaît une descendance particulièrement florissante au sein de la musique contemporaine et au-delà. Ont ainsi vu le jour des appellations diverses et aux contours flous : Postminimalism (John Adams, Ingram Marshall, Michael Gordon, Mikel Rouse, le label Cold Blue...), Totalism (Glenn Branca, Rhys Chatham...).
En Angleterre des compositeurs tels que Gavin Bryars et Michael Nyman peuvent être affiliés au minimalisme. Critique musical avant d'être reconnu en tant que compositeur, Michael Nyman serait le premier à avoir employé le terme "minimalisme" dans le domaine de la musique, dans un article publié dans la revue The Spectator en 1968. Aux Etats-Unis, le terme de New Music s'est imposé pour englober ce vaste domaine de création protéiforme comprenant l'héritage minimaliste, les musiques électroniques, la musique contemporaine puisant dans la Pop music...
Les pionniers du minimalisme sont très fréquemment cités par bon nombre de musiciens et groupes pop des années 1960 à aujourd'hui. Le Velvet Underground se situe en filiation directe avec ce courant. Au début des années 1960, John Cale, Angus MacLise et Tony Conrad ont participé au Theatre of Eternal Music de La Monte Young, notamment au sein de la formation nommée Dream Syndicate, avant que John Cale, Angus MacLise ne forment le Velvet Underground. John Cale a également enregistré en 1970 l'album Church of Anthrax avec Terry Riley. Les anglais de Soft Machine reconnaissent en Terry Riley une influence majeure, tant par ses travaux de manipulations de bandes magnétiques que par son approche modale et répétitive de la musique. L'écoute de Third de Soft Machine, chef d'oeuvre monolithique et expérimental paru en 1970, suffit à s'en convaincre. La filiation passe ici par le fondateur de Gong et proche ami de Soft Machine, Daevid Allen, qui travailla lui-même avec Terry Riley au début des années 1960.
Le courant minimaliste a également exercé une influence indéniable sur le rock planant allemand, autrement appelé Krautrock. Les nappes synthétiques brodées par Tangerine Dream et les expérimentations guitaristiques de Manuel Göttsching d'Ash Ra Temple ne sont pas sans rappeler La Monte Young et Terry Riley (tout particulièrement les oeuvres pour orgues de ce dernier). Le groupe Faust et Tony Conrad ont enregistré ensemble l'album Outside the Dream Syndicate en 1972, alors que Tony Conrad est en Allemagne pour la Documenta de Kassel. Les ramifications du minimalisme sont foisonnantes ! En 1999, Sonic Youth a livré une nouvelle interprétation de Pendulum Music de Steve Reich, une oeuvre créée dans les années 1970. Lee Ranaldo de Sonic Youth, qui participa également aux symphonies de Glenn Branca, fit remasteriser l'une des plages de Four Manifestations On Six Elements de Charlemagne Palestine, un disque publié en 1996, regroupant divers travaux des années 1960/1970.
On retrouve encore les minimalistes parmi les influences du mouvement techno. Une dizaine de DJ rendait d'ailleurs hommage à Steve Reich avec l'album Steve Reich Remixed en 1999, sur lequel figurent DJ Spooky, Ken Ishii et Coldcut (les fondateurs du label Ninja Tune).