Tenzier frappe encore, avec la régularité d'un métronome, une référence par an. Tenzier, «organisme sans but lucratif dont le mandat est de préserver, de mettre en valeur et de diffuser des archives sonores issues des avant-gardes québécoises», nous livre cette fois, rehaussée d'une pochette miraculeuse, véritable tableau de maître du psychédélisme inspiré par Escher, une rétrospective du compositeur Bernard Gagnon avec sept pièces inédites enregistrées au studio électronique de l’Université McGill. Bernard Gagnon assista à un séminaire d'Iannis Xenakis à Montréal et fit la rencontre de John Cage dans le cadre d’un projet de performances collectives, ce qui en terme d'avant-garde place la barre aux sommets de l'expérimental. Mais l'expérimentation n'est pas absconse entre ses mains.
Bernard Gagnon démarre ses cultures de plantes électroniques en 1975. Entre concordances et similarités on pourra le rapprocher d'un autre Bernard, Parmegiani de son nom. Il faut cependant déployer la liste de l'attirail utilisée pour en circonscrire la mixité : arp 2600, bandes magnétiques, basse, batterie, clarinette, guitare, synclavier II, synthétiseur modulaire moog, vocodeur et divers instruments conçus par Hugh Le Caine. La musique électroacoustique dans ses coutures connues est présente, quoique plus libertaire. «Gwendoline Descendue!» fait ainsi voyager le spectrogramme du côté des spirales, du granuleux et des sons étirés. Est aussi présente la déconstruction du langage apte à la disjonction des synapses (Léo mange le Boa, le boa mange Léo). La rétrospective se termine par un démentiel «Gololo-Mashta» qui révèle un précurseur oublié d'Autechre.