Cyclopean

Cyclopean [EP] (Mute / Spoon, 2013)

[EP] (Mute / Spoon, 2013)

Le quatuor Burnt Friedman, Jaki Liebezeit, Jono Podmore et Irmin Schmidt sort un premier EP sous le nom de CYCLOPEAN. L'air de rien c'est une sacrée équipée qui se forme ici. Bien sûr, il y a Jaki Liebezeit et Irmin Schmidt «de Can», mais pas que. Les quatre musiciens ont chacun participé à bon nombre de projets.

Jaki Liebezeit s'est impliqué dans le Phantomband, Drums Of Chaos, Club off Chaos, ou encore dans des projets avec Michael Rother, Brian Eno, Jah Wobble. Il collabore avec Burnt Friedman depuis 2001. Burnt Friedman a formé avec Atom Heart le groupe Flanger, qui a publié deux albums sur Ninja Tune. Burnt Friedman a ensuite lancé le label Nonplace en 2000, sur lequel ont été publiés, entre autres, le troisième album de Flanger et les productions du duo Burnt Friedman & Jaki Liebezeit, en particulier la série des Secret Rythms : quatre volumes depuis 12 ans, un cinquième à paraître en avril 2013.

Avant, pendant et après Can, Irmin Schmidt a créé quelques dizaines de musiques pour le cinéma, la télévision et pour un opéra, Gormenghast en 1998. C'est lors de l'élaboration scénique de cet opéra que son association avec Jono Podmore a démarré. Dès les années quatre-vingt-dix Jono Podmore, alias Kumo, a été DJ, compositeur et ingénieur du son pour le cinéma, la télévision, le théâtre et pour de nombreux labels anglais : Plink Plonk, Dorado, One Little Indian et Psychomat. Jono Podmore est par ailleurs intervenu lors de la remasterisation des albums de Can et de The Lost Tapes. Derrière la superbe pochette colorée de CYCLOPEAN, l'une des plus belles du catalogue Spoon Records, ce n'est donc pas un background s'est une constellation qui se déploie.

Avec le premier titre « Apostles » le maxi single démarre mollement. Le jeu de Jaki Liebezeit est en pointillés réguliers, essentiellement sur ses toms et épisodiquement sur ses cymbales. Le canevas électronique qui l'accompagne est complexe, des sons un peu dub, un peu liquides, des samples machiniques. On a entendu plus emballant dans le domaine de l'art sonore. A partir de « Fingers » on décolle vraiment et ce pour le reste du EP de CYCLOPEAN. Les éléments ne sont pas foncièrement différents, mais il y a quelques suppléments de matière : des réverbérations synthétiques lointainement ethniques, des pulsations électroniques, des cordes pincées, des sonorités de dijeridoo cybernétique... Irmin Schmidt est plus présent au piano, le jeu qu'il développe évoque les compositions de temps suspendu de Morton Feldman, voire Ligeti, ou bien un Terry Riley plus économe en notes. Son jeu répétitif vient alors se placer en contrepoints des rythmes afro-balinais de Jaki Liebzeit. CYCLOPEAN crée une force de propulsion carrément addictive. La preuve, on en redemande à la fin : «Weeks» est trop court, « Knuckles » carrément cut.

© Eric Deshayes - neospheres.org