Fantazio ne fait pas dans le prosélytisme forcené. Il vous embarque. Il vous embarque par son simple talent de l'arrangement complexe qui passe bien, par des ruptures de cadence, par une orchestration luxuriante. Il vous embarque dans un imaginaire noir de suie, colorisé à coups de reflets de cuivres de big band, de rythmes hip-hop ou manouches, de cordes de banjo, de contrebasse et de guitare, invitant aussi pour cela de nombreux musiciens, dont l'accordéoniste René Lacaille.
Pas prosélyte Fantazio saute facilement du français à l'anglais (à l'espagnol aussi) pour déclamer sa prose riche et habitée autant par le dégoût de notre société asociale que par un surréalisme de cartoon et une envie d'inviter l'autre, un désir qui se ressent par ses couleurs musicales hors frontières. On note même deux courtes tirades de Bernadette Laffont prenant position pour Frantz Fanon l'anti-colonialiste père du tiers-mondisme.
Cinq mille ans de danse crue... et de grands pas chassés, un titre qui nous fait remonter à la protohistoire, est joyeusement corrosif à la manière d'un Captain Beefheart. Dément peut-on se dire, mais Fantazio n'est pas dément puisque tout à fait conscient et maître de son art, ce qui est encore plus impressionnant et finit de vous convertir et de vous laisser embarquer sur le parquet pour une danse entre valse et pogo.