Richard Pinhas reprend en quelque sorte le chantier là où; il l'avait laissé. L'album Tranzition de 2004 se terminait par un long Metatron (an introduction to) et annonçait explicitement l'ouverture d'un nouveau champ d'exploration. Cette mise en bouche faisait 25 minutes, il fallait s'attendre à un développement plutôt conséquent. Effectivement, Metatron est un double album qui avoisine les 2h10, agrémentées d'une vidéo de 9 minutes. Difficile de résumer en quelques lignes cette vaste entreprise d'autant plus qu'elle est, à l'image de la pochette du disque, de la nature des rhizomes : des extensions de branches préexistantes ouvrant elles-mêmes sur de nouveaux réseaux fibreux.
Plus explicitement, Metatron est, tout naturellement, une extension d'Heldon, de Schizotrope et des albums solo de Richard Pinhas. Ésquissons tout au plus les principales lignes de forces, ou plutôt artères. On retrouve aux côtés de Richard Pinhas (guitare, électronique et metatronic process) la paire Jérôme Schmidt (laptops & loops), dont l'électronique est parfaitement intégrée à l'ensemble, et Antoine Paganotti (batterie), dont le jeu est tantôt improvisé tantôt rythmique. A ce trio fondamental s'adjoignent selon les titres, de vieilles connaissances, Patrick Gauthier (minimoog), Alain Renaud (guitare) et Didier Batard (basse), et des rencontres plus récentes : le violoniste Philippe Simon (déjà présent sur Tranzition) et Chuck Oken Jr. (synthé), le batteur de Djam Karet, groupe avec lequel Richard Pinhas a un projet d'album en cours.
Metatron renoue avec les envolées froides et grandioses qui caractérisent l'univers musical de Richard Pinhas, avec ce quelque chose d'indéfinissable qu'ont les lignes de synthé et les notes de guitares étirées, qui vous soulève littéralement le coeur comme un avion au décollage. L'adjectif froid n'est qu'une simple façon de parler. L'être humain a le sang chaud, et on le sent pulser dans nos veines sur la plupart des titres. Sur cet album la musique de Richard Pinhas respire tout simplement. Elle est même beaucoup plus aérée que par le passé. Elle trouve là une ampleur naturelle et des qualités psychotropes tout aussi biologiques. Ici c'est une voix (celles Maurice Dantec, William Burroughs...) qui s'immisce dans votre esprit, là une mélodie au synthé. Quelques titres montrent aussi, faut-il le rappeler, que le jeu de guitare de Richard Pinhas doit autant, voire plus, à Jimi Hendrix qu'à Robert Fripp.
La vidéo est un carnet de voyage, un montage de moments, sur scène et sur les routes nord-américaines, filmés lors de la tournée de 2004, accompagnée par le titre Tikkun (part 4). Metatron est finalement un album très live, très vivant justement, qui annonce des sets aux multiples possibilités pour la tournée 2006 - 2007 du trio Richard Pinhas / Jérôme Schmidt / Antoine Paganotti.