Rahsaan Roland Kirk

Il exprime son souffle vital en jouant de trois saxophones à la fois. Il chante dans les interstices. Il joue de la flûte à nez, aussi. Son registre ? La Great Black Music. En Majuscules. Blues, Soul Music, Free Jazz...

TRoland Kirk, Triple Heat (1957)

Kirk peut être affilié au Hard Bop, à ses débuts. Il demeure inclassable. Sa discographie embrasse toute l'histoire du jazz, du New Orleans à l'expérimentation en studio, en passant par l'avant-garde free. Le souffle de Roland Kirk inspire et expire intensément la Great Black Music. Il joue "Misty" d'Erroll Garner, "Jitterburg Waltz" de Fats Waller, "The Entertainer" de Scott Joplin, "Petite Fleur" de Sydnet Bechet. Son répertoire inclut des thèmes de Lester Young, Charlie Parker, John Coltrane, Thelonious Monk, Charles Mingus...

Roland Kirk les reprend toujours à sa manière, dans un style peu orthodoxe. Il chahute les classiques du Jazz en jouant de plusieurs saxophones, en prolongeant des notes d'une manière inhabituelle, et en ponctuant ses soli de coups de sifflets et de sirènes.

Kirk a l'habitude d'ânonner un air tout en le jouant à la flûte. Au cours des années 60, sa panoplie s'est élargie à plus d'une quarantaine d'instruments. Outre ses divers saxophones, clarinettes et flûtes, il joue de l'harmonica, du cor et d'instruments créés par lui-même. Un "trumpophone" (une trompette modifiée), un "slidesophone" (un petit trombone modifié)... Insatiable expérimentateur, Kirk s'accompagne de boîtes à musique : sur "March On, Swan Lake" de l'album Gifts and Messages et sur "Ruined Castles", sur l'album I Talk With The Spirits, en 1964. En concert, il joue de la flûte à nez : une petite flûte placée dans une narine utilisant l'expiration nasale.

Roland Kirk Down Beat mai 1963

Sur I Talk With The Spirits figure l'un des classiques de Kirk : "Serenade To A Cuckoo", régulièrement interprété lors de ses concerts. Grand admirateur, Ian Anderson, flûtiste et chanteur de Jethro Tulll reprend "Serenade To A Cuckoo" sur l'album This Was en 1968.

Lorsqu'il n'est pas sur scène ou en studio, Roland Kirk est constamment à la recherche de nouveaux sons. Véritable encyclopédiste de la musique, il possède à la fin de sa vie une collection évaluée à 6000 disques. Il écoute aussi bien les Pygmées qu'Edgar Varèse, du jazz bien-sûr, mais aussi du rock, de la musique classique et de la musique sérielle.

En tournée, Roland Kirk emmène toujours avec lui une cinquantaine de disques et une platine vinyles, pour pouvoir les écouter à l'hôtel. Il aime réarranger tout ce qu'il entend, aussi bien des chansons de soul music, qu'une publicité pour de la bière. De même, les sons du quotidien viennent ponctuer ses albums studios : bris de verres, passages de trains, pas sur le sol, aboiements, caisse enregistreuse...

Roland Kirk essaya de nouveaux instrument électrifiés, comme le lyricon (une hybridation de saxophone / clarinette électronique) ou le "surolophone", un trombone électronique hybride de sa propre invention qu'il utilisa au festival de Newport, en 1962, pour le morceau inspiré par Edgar Varèse "The Confusions of a Madman" (un morceau malheureusement jamais édité sur disque). Roland Kirk demeure réticent vis à vis de la musique électrifiée. Il considère que celle qui passe à longueur de journée sur les grandes radios, fait subir aux auditeurs un véritable lavage de cerveau. Ce qui ne l'empêche pas d'admirer Jimi Hendrix, avec qui il joue à deux reprises au Ronnie Scott Club de Londres (en 1967 et en 1969). Roland Kirk a aussi l'occasion de jouer avec Frank Zappa, Eric Burdon, Eric Clapton et Santana. Il existerait des enregistrements, de mauvaise qualité, de ces rencontres Roland Kirk / Jimi Hendrix.

D'un tuyau d'arrosage à Kirkatron

Ronald Theodore Kirk naît à Colombus, Ohio, en 1936. Déficient visuel de naissance, il perd totalement la vue à deux ans. Il découvre le Gospel et les Spirituals à l'église baptiste que fréquente ses parents. Dès l'âge de cinq ou six ans il confectionne son propre instrument à partir d'un bout de tuyau d'arrosage, dont il se sert comme d'une trompette. Ronald "Ronnie" Kirk effectue sa scolarité à l'Ohio State College for The Blinds de 1941 à 1953. Dans cette école, il apprend à jouer du bugle, de la trompette, de la clarinette... A 12 ans, il joue de la clarinette dans l'orchestre de l'école, puis rejoint le Junior Elks Marching Band. A partir de 13 ans il étudie le saxophone. En 1952, Ronald Kirk est engagé dans le Boyd Moore's Band, un groupe de rhythm and blues de Colombus qui privilégie les standards du Jazz et les Hits du Top 40. Lorsque Roland Kirk commence à jouer simultanément du manzello et du saxophone ténor, Boyd Moore le trouve trop moderne et le vire de son orchestre.

En 1953, à 17 ans, Kirk rejoint Bruce Woody and The Chips, avec qui il tourne pendant plusieurs mois et enregistre le 78 tours "Ooh Pretty Baby". C'est à cette époque qu'il fait son rêve devenu légendaire : il se voit jouer de trois saxophones simultanément. Dès le lendemain il se rend dans un magasin d'instruments et y trouve son stritch (un saxophone Buescher droit de 1927). En travaillant sa technique très personnelle de respiration circulaire, qu'il appellera "respiration sphérique" et "triple threat", il devient capable de jouer en même temps du saxophone ténor, du manzello et du stritch.

Roland Kirk - Third Dimension (rééd. Triple Heat, Bethlehem Records, 1962)

Roland Kirk se heurte cependant à l'incompréhension de certains critiques qui l'accusent de faire des singeries. Il tente alors sa chance à Los Angeles, en vain. Sur le chemin du retour, il fait une halte à Saint Louis et y rencontre Charlie Parker. De retour dans l'Ohio, Roland Kirk installe son pied-à-terre à Chicago et tourne de ville en ville (Chicago, Cincinnati, Indianapolis, New-York, Nashville...), notamment en compagnie de Ron Burton (claviers) et Slim Jackson (batterie). En novembre 1956, Roland Kirk enregistre son premier album Triple Threat, dans un style Hard Bop de très bonne facture, avec James Madison (piano), Carl Pruitt (basse) et Henry Duncan (batterie). Mais le petit label King Records ne lui assure pas une promotion suffisante et Triple Heat tombe dans l'oubli. Il est réédité par Bethlehem Records, titré Third Dimension en 1962, puis sous le titre de Early Roots en 1977. A la fin des années 50 Roland Kirk continue de tourner dans le Midwest avec le pianiste et organiste Eddie Baccus, qui a également fréquenté l'Ohio State College for The Blinds.

Introducing Roland Kirk (Argo, 1960)

En 1960, Roland Kirk enregistre en quintette Introducing Roland Kirk pour le label Argo, et bénéficie cette fois d'une bonne distribution. Il est publié par Barclay en France. L'année suivante, grâce à Quincy Jones, il décroche un contrat sur le long terme avec Mercury. Sur son premier album pour Mercury, We Free Kings, figure pour la première fois Three For the Festival, l'un des thèmes les plus joués par Kirk tout au long de sa carrière, ainsi que You Did It, You Did It, sur lequel Kirk inaugure, sur disque, son "chant flûté" (il chante et joue de la flûte simultanément).

En 1961, Roland Kirk intègre pendant 4 mois l'orchestre de Charles Mingus, et participe aux albums Oh Yeah et Tonight at Noon. Il se fait ainsi connaître plus largement. La même année, Roland Kirk effectue un premier voyage en Europe avec sa propre formation et se produit au Festival de Jazz d'Essen, en Allemagne de l'Ouest. Dès lors sa réputation est faite au niveau international et tout s'accélère pour lui. Il participe à l'album de Roy Haynes Out of The Afternoon. Il enregistre son quatrième album en leader, Domino (auquel participe Roy Haynes). Il est la révélation du Newport Jazz Festival en été 1962 (ce concert a été édité en cd par Top Note en 2023). Quincy Jones l'engage pour les enregistrements de Hip Hits et Bossa Nova...

Au cours des décennies 60 et 70 Roland Kirk se produit lors de nombreuses tournées et dans les principaux festivals à travers le monde (États-Unis, Canada, Europe, Australie, Nouvelle-Zélande, Japon...). Au cours des années 60, il joue régulièrement au Ronnie Scott's club de Londres. L'album live Gifts and Messages y est enregistré en 1964, ainsi que la vidéo Roland Kirk & John Cage : Sound ??. Ce documentaire réalisé en 1966 contient des extraits de concerts commentés par John Cage lui-même. Le documentaire a été publié par Rhapsody Films en 1988. Il est disponible sur UBU Web.

En plus de donner d'innombrables concerts, à partir de 1962 Roland Kirk enregistre au minimum deux albums studios par an. Sur I Talk With The Spirits, publié en 1965, il joue exclusivement de la flûte. Il sort la même son grand classique Rip, Rig and Panic. De là vient le nom du groupe post-punk Rip Rig + Panic, dans lequel Neneh Cherry a fait ses débuts. Now Please Don't You Cry, Beautiful Edith (1967).

En 1967, Roland Kirk quitte Mercury pour rejoindre Atlantic, un changement de maison de disques qui lui donne des ailes. Son premier album sur Atlantic, The Inflated Tear (1968) fait la transition en offrant un concentré de son univers musical. Puis il enregistre à la tête d'un orchestre de près de 30 musiciens Left and Right (1968) quelques grands thèmes du Third Stream, cette fusion Jazz / Musique classique parfois risquée.

En 1967 également, Roland Kirk joue de la flûte sur quelques titres de la bande originale du film In The Heat of The Night composée par Quincy Jones. Cet excellent polar réalisé par Norman Jewison, titré Dans la chaleur de la nuit en version française, est l'un des tous premiers films hollywoodiens ou un noir, Sydney Poitier, tient le rôle principal. Cette B.O. est aussi émaillée de la présence de Ray Charles pour le titre In The Heat of The Night. Ce film, à voir absolument, rafle cinq Oscars en 1968.

L'album Volonteered Slavery, publié en 1969, contient, outre des compositions de Kirk, une reprise de "My Cherie Amour" de Stevie Wonder, une adaptation de "I Say A Little Prayer" d'Aretha Franklin (composé par Burt Bacharach et Hal David). La face B du 33 tours est l'enregistrement du concert donné au festival de Newport en 1968, où Roland Kirk rendait hommage à John Coltrane (décédé en septembre 1967). La formation interprète des titres du répertoire de John Coltrane : "Lush Life", "Afro-Blue" et "Bessie's Blues".

Fin 1969, Roland Kirk fait un rêve pour le moins mystique : Dieu s'adresse directement à lui en l'appelant "Rahsaan". Il décide alors d'adopter ce nouveau nom, qui signifie selon lui "la musique du Soleil, "le voyageur" ou encore "black vibrations". La même année, exaspéré par le peu de place accordée aux Jazzmen dans les médias américains, il met sur pieds le Jazz and People's Movement, auquel participe Elvin Jones, Archie Shepp, Lee Morgan, Andrew Cyrille, et bien d'autres. Le collectif en vient rapidement à des actions coup de poing. Le 27 août 1970, 60 à 80 personnes font irruption dans le Merv Griffin Show, avec sifflets, cloches, tambourins et des banderoles portant les slogans : "More Jazz Music on TV", "Honor American Jazz Music"... Le Jazz and People's Movement fait également irruption dans le Dick Cavett Show, mais échoue aux portes du Johnny Carson Show.

Puis Rahsaan envoie une lettre à Ed Sullivan, présentateur du Ed Sullivan Show, l'une des émissions musicales les plus réputées de la télévision américaine. Il lui signifie que son show est la prochaine cible du Jazz and People's Movement. L'épisode est relaté par John Kurth dans la biographie Bright Moments. Pour éviter d'être à son tour victime d'un tohu-bohu, Ed Sullivan décide de négocier avec le collectif. Le coordinateur artistique de l'émission apprécie la reprise de "My Cherie Amour". Il est proposé à Roland Kirk de venir jouer ce titre dans l'émission. Proposition acceptée. Le 24 janvier 1971, la formation de Roland Kirk joue au grand complet, augmentée de Charles Mingus, Archie Shepp et Roy Haynes. Ils jouent Haitian Fight Song, le brûlot politique composé par Charles Mingus, devant un Ed Sullivan pâle comme la mort.

Quelques mois plus tard Rahsaan Roland Kirk est arrêté par le FBI à l'aéroport de Cleveland pour tentative de détournement d'avion. Il est finalement libéré sous caution au bout de deux jours. Sa rencontre à la fin des années soixante avec Huey Newton et Bobby Seale, deux des principaux leaders du Black Panthers Party, faisait de lui un individu potentiellement dangereux.

Le saxophoniste proclame haut et fort son changement de nom en publiant en 1970 Rahsaan Rahsaan, un album qui figure parmi les plus aventureux de sa carrière, où l'atonalisme côtoie les sonorités funky. Et ça marche. L'album atteint la 18ème place du Billboard en 1971. Rahsaan Roland Kirk semble décidé à prouver que ses talents de compositeur et d'interprète transcendent la catégorie jazz qu'on lui impose. Tous les albums studios qui suivent affirment chacun une facette différente de ce qu'il nomme la "musique classique noire". Pour Natural Black Inventions : Root Strata (1971) il se lance un nouveau défi : n'avoir recours à aucun "accompagnateur", il jouera lui-même de tous les instruments, sans utiliser le re-recording. Il a fait quelques petites entorses à la règle (Joe Texidor joue des percussions et utilise quelques effets sonores sur deux morceaux). Le résultat est magistral.

Avec Blacknuss (1972) Rahsaan revient à ses premières amours, il consacre un album entier à des reprises de grands classiques de la soul ("Ain't No Sunshine", "What's Goin' On", "My Girl", "Never Can Say Goodbye"...). Il sort ensuite un album aux antipodes de Blacknuss : Prepare Thyself To Deal With A Miracle (1973). Le Third Stream y côtoie les percussions africaines et le Free Jazz. Le label Rhino a publié en 2006 Brotherman In The Fatherland, un concert au Funkhaus de Hambourg en mars 1972, diffusé à l'époque par une radio allemande.

Roland Kirk, The Case Of The 3 Sided Dream In Audio Color (1975)

Deux ans plus tard, il décide de mettre prématurément fin à son contrat avec Atlantic en sortant un double album (pour répondre à l'obligation qu'il a de sortir deux disques avant de quitter la maison de disque). Il commence par réinterpréter des thèmes qu'il a maintes fois joués durant sa carrière et à écrire quelques compositions inédites, puis, de fil en aiguille, avec l'aide du producteur et ingénieur du son Joel Dorn, il lie l'ensemble avec des bruitages et des effets sonores. C'est ainsi que naît The Case Of The 3 Sided Dream In Audio Color (1975), un concept-album Jazz-Rock unique en son genre, et l'un des meilleurs disques studios de sa carrière.

Ces séances studios ne sont que de brefs intermèdes pour Rahsaan Roland Kirk, qui enchaîne tournées et festivals. Une multitude d'albums live couvrant cette période en témoigne, parmi lesquelles I, Eye, Aye (au Festival de Montreux de 1972), Bright Moments (au Keystone Korner à San Francisco en juin 1973), The Man Who Cried Fire (une compilation d'enregistrements captés au Keystone Korner de 1973-1977), Mingus at Carnegie Hall (Kirk retrouve Charles Mingus pour un concert exceptionnel au Carnegie Hall en 1974) ; Compliments of the Mysterious Phantom (un concert enregistré à San Diego en novembre 1974 et publié par Hyena en 2003). Rhino a publié en 1996 I, Eye, Aye: Live at the Montreux Jazz Festival, 1972. Ci-dessous, "Seasons", joué à Montreux.

En novembre 1975, Rahsaan Roland Kirk est victime d'une rupture d'anévrisme et devient hémiplégique. Il fait alors modifier son saxophone et sa flûte afin de pouvoir en jouer d'une seule main. Au moment de cet accident, Kirk enregistrait Kirkatron. Cet album est complété en 1976 par de nouveaux enregistrements et quelques archives. En mars 1976 Rahsaan enregistre surtout Other Folks' Music. Moins omniprésent, il laisse fréquemment le trompettiste Richard Williams mener le jeu. Il se concentre sur ses compositions, très inspirées par la musique classique européenne (accompagnement de cordes, harpe...). Il continue à se produire régulièrement sur scène. Au cours de l'été 1977 il participe à des lectures en plein air avec Allen Ginsberg, William Burroughs, Charles Lloyd, The Flying Karamazov Brothers... Rahsaan Roland Kirk succombe à une attaque cardiaque le 5 décembre 1977.

L'album Boogie-Woogie String Along for Real enregistré en 1977 prolongeait l'expérience classique, mais avec moins de réussite, Kirk ressentant lourdement ses limites physiques.

Sélection discographique :

Verve Jazz Masters 27 (Compilation - Verve, 1994)

Verve Jazz Masters 27 (Verve, 1994).
Un survol des années Mercury / Verve (1961 à 1967) en 16 titres. Cette excellente compilation inclut la première version de "Three for The Festival" et le magnifique "Haunted Melody" extraits de We Free Kings (1961), le bondissant "From Bechet, Byas and Fats" de Rip, Rig and Panic (1965). Elle contient aussi Berkshire Blues, un single de 1964 sur lequel Roland Kirk chante à la Ray Charles !


Gifts and Messages (Mercury, 1964)

Gifts and Messages (Mercury, 1964)
Ses premiers albums studios étant relativement sages, rien de tel que ses albums live pour connaître la vraie nature de Roland Kirk : gouailleur, énergique et tonitruant. Gifts and Messages a été enregistré au Ronnie Scott Club, le club londonien ù Kirk jouait régulièrement lors de ses séjours en Europe. En prise directe sur les rires et les cris de Kirk, parfait pour découvrir sa virtuosité d'homme-orchestre.


I Talk With The Spirits (Mercury, 1964)

I Talk With The Spirits (Mercury, 1964)
L'un des plus beaux albums de la période pre-rahsaan. Roland Kirk se consacre exclusivement à la flûte, l'un des instruments les plus expressifs qui soient. I Talk With The Spirits est captivant de bout en bout, parsemé d'instants magiques, lorsqu'il s'accompagne d'une boîte à musique sur "Ruined Castles". L'album culte du flûtiste de Jethro Tull, Ian Anderson , l'un des grands promoteurs de Roland Kirk en dehors de la sphère Jazz.


Rip, Rig and Panic (Mercury, 1965)

Rip, Rig and Panic (Mercury, 1965)
Son disque le plus connu, l'un des premiers groupes de Neneh Cherry ayant pris pour nom le titre de cet album au début des années 80. Roland Kirk bénéficie d'une section rythmique de rêve : Elvin Jones à la batterie, Jaki Byard au piano et Richard Davis à la basse. Du Hard Bop kirkien épuré. Rip, Rig and Panic étant relativemengt court, il a été réédité en CD accompagné de l'album Now Please Don't You Cry, Beautiful Edith(Verve, 1967) également excellent.


The Inflated Tear (Atlantic, 1968)

The Inflated Tear (Atlantic, 1968)
Son premier album pour Atlantic. Tout Kirk est là. "The Black and Crazy Blues", un blues faussement traditionnel qui transfigure le genre. Des mélodies scandées comme des refrains un peu à la Thelonious Monk. Kirk qui assure une section de cuivre à lui seul en soufflant simultanément dans ses 3 saxophones... L'album par lequel il faut commencer si vous ne connaissez pas encore la musique de (Rahsaan) Roland Kirk.


Left and Right (Atlantic, 1968)

Left and Right (Atlantic, 1968)
A la tête d'un orchestre d'une trentaine de musiciens (Alice Coltrane à la harpe, Pepper Adams au sax bariton, une section à cordes au grand complet...) Roland Kirk interprète et réarrange avec panache des thèmes de Quincy Jones ("Quintessence"), Billy Strayhorn ("A Flower Is a Lovesome Thing"), Charles Mingus ("I X Love")... Lady's Blues", signé Kirk un peu trop sirupeux, Left and Right est un Must Have pour tout les amateurs de jazz classico-classieux.


Rahsaan Rahsaan (Atlantic, 1970)

Rahsaan Rahsaan (Atlantic, 1970)
Rahsaan Rahsaan, c'est de la musique contemporaine atonale sur laquelle se superpose les bavardages désormais familiers de Kirk, du free groove ponctué d'effets sonores, du jazz New Orleans qui termine en jam-session déchaînée... Avec cet album, celui qu'il faut dorénavant appeler Rahsaan, affirme haut et fort son intention d'imposer la musique classique noire. Il est alors totalement en phase avec la Great Black Music défendue par l'AACM et l'Art Ensemble Of Chicago.


Natural Black Inventions Root Strata (Atlantic, 1971)

Natural Black Inventions Root Strata (Atlantic, 1971)
Un album solo, au sens propre du terme, hormis quelques passages Rahsaan Roland Kirk assure tous les instruments sur l'intégralité de l'album : saxes, flûtes, percussions, carillons, sound effects... et sans utiliser le re-recording. Une merveille qui rappelle par moment l'esthétique des pasacailles minimalistes de Moondog.


Blacknuss (Atlantic, 1972)

Blacknuss (Atlantic, 1972)
Il n'y avait pas de musicien "jazz" mieux placé que Rahsaan Roland Kirk pour reprendre les grands classiques de la Soul Music : "Ain't No Sunshine" de Bill Withers, "What's Going On" de Marvin Gaye, "My Girl" des Temptations, "Never Can Say Good Bye" de Clifton Davis... Et en prime un titre original, One Nation, avec Princess Patience Burton : du pur groove à réveiller les morts. Un album indispensable pour tous les adeptes de Soul !


Prepare Thyself To Deal With A Miracle (1972)

Prepare Thyself To Deal With A Miracle (1972)
Du même tonneau que Rahsaan Rahsaan. La première partie de cet album est dominée par une sorte de Third Stream penchant plus du côté de la musique contemporaine que du jazz. La seconde partie est quand à elle nettement plus orientée Jazz libre. De la Great Black Music tout aussi jouissive que celle produite par l'Art Ensemble of Chicago dans les années soixante-dix.


The Case of The 3 Sided In Audio Color (1975)

The Case of The 3 Sided In Audio Color (1975)
Le chef-d'oeuvre de Rahsaan Roland Kirk. En plus de reprendre ses plus grands thèmes, il s'empare des nouvelles techniques de studio (assisté du producteur Joel Dorn) pour, au final, créer un concept-album soul-jazz-rock délirant. The Case of the 3 Sides Dream In Audio Color est ponctué de bruitages en tous genres (parties de Ping-Pong, course de chevaux...) et des contes oniriques de Rahsaan. Ses interludes parlés ou incluant divers bruitages préfigurent, par cette forme, des albums hip-hop tels que "3 Feet High And Rising" de De La Soul.


The Man Who Cried Fire (1973 - 1977)

The Man Who Cried Fire (enregistré de 1973 à 1977)
Une compilation de morceaux live enregistrés de 1973 à 1977 à San Francisco, Paris, Los Angeles et la Nouvelle Orléans. Kirk continue sur scène son exploration / réinterprétation de la tradition musicale noire-américaine, notamment la tradition du Blues et du Jazz (New Orleans, scat...). Contient des passages d'anthologie de la virtuosité kirkienne : trois saxophones en simultanés, notes tenues grâce à son souffle continu, Kirk jouant et chantant simultanément...

Rahsaan Roland Kirk : Discographie - Vidéographie

Bibliographie :

  • John Kruth, Rahsaan Roland Kirk : Des moments lumineux - Sa vie, son héritage, traduit de l'anglais par Pascal Nuoffer (Infolio, 2008).
  • Matthieu Jouan, Notoriété et légitimation en jazz, l'exemple de Rahsaan Roland Kirk (L'Harmattan - Collection Logiques Sociales, 1999). mémoire de maîtrise remanié de Matthieu Jouan, co-fondateur de Citizen Jazz.
  • Discography par Michael Fitzgerald (dernière mise à jour en 1996)
  • Guy Cosson, Rahsaan Roland Kirk (Editions du Layeur, 2006).
© Eric Deshayes - neospheres.org